Espionnage

Réseau Echelon: la justice française ouvre une enquête

Une enquête préliminaire sur les activités du réseau Echelon vient d’être lancée par la justice en France, révèle Le Figaro. L’existence de ce gigantesque réseau anglo-saxon d’espionnage des télécommunications est pourtant connue de longue date.

Echelon, le plus vaste réseau d’interception des télécommunications jamais créé, fait l’objet d’une enquête judiciaire depuis quelques semaines. La décision a été prise le 24 mai dernier par le Procureur de la République de Paris, révèle le quotidien Le Figaro. Cette enquête préliminaire, Jean-Pierre Dintilhac a décidé de la confier aux services de contre-espionnage français de la DST (Direction de la surveillance du territoire).

A l’origine de cette initiative judiciaire, on trouve un parlementaire: le député européen Thierry Jean-Pierre. Cet ancien juge d’instruction s’est ému dans une lettre au Procureur de la République de Paris des pratiques du réseau Echelon qui sont "de nature à porter un préjudice considérable à l’ensemble de nos concitoyens, de nos intérêts économiques et nationaux". C’est cette lettre qui provoque, trois semaines plus tard, l’ouverture de l’enquête préliminaire pour «atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation».

Les révélations de Duncan Campbell

A l’origine de la préoccupation du député européen, les révélations du journaliste Duncan Campbell. Dans un rapport commandé par le Parlement européen, cet enquêteur infatigable, révélait à l’automne dernier l’ampleur du réseau patiemment édifié par les Etats-Unis et leurs alliés (Grande-Bretagne, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande) depuis 1948.

Constitué à des fins militaires au lendemain de la Seconde guerre mondiale, le réseau Echelon a vu ses capacités augmenter régulièrement jusqu’à la fin des années 80 en vue d’espionner l’Union soviétique. Cependant, la chute du Mur de Berlin n’a pas conduit au démantèlement du réseau, au contraire. Une large partie des moyens techniques ont été réorientés en vue, officiellement, de tenir compte des nouvelles menaces (terrorisme, trafic de drogue, etc). Dans les faits, l’un des objectifs assignés aux techniciens de l’espionnage électronique est désormais d’aider à remporter la "guerre économique" dans laquelle les adversaires d’aujourd’hui sont parfois les alliés d’hier. Et dans ce nouveau contexte, l’Union européenne et ses entreprises font figure de cible n°1.

Des hommes politiques embarrassés

La découverte officielle du réseau Echelon remonte à 1997, dans un premier rapport commandé par le Parlement européen, il était fait état de l’existence de ce système mondial et automatisé d’interception des télécommunications. Il y a six mois, Duncan Campbell est venu devant les parlementaires européens confirmer et préciser le fonctionnement de ce réseau espion. Des révélations qui n’ont finalement suscité que très peu de réactions politiques en Europe. Il faut dire qu’aucun des services secrets des Quinze et aucun des gouvernements n’ignorait l’existence du réseau Echelon.

De plus, certains pays dont la France, disposent de systèmes d’espionnage équivalents dans leur mode de fonctionnement, même s’ils sont moins étendus géographiquement. Le réseau français a d’ailleurs déjà été surnommé "Frenchelon". Une situation qui explique sans doute le peu d’empressement, jusqu’ici, des politiques européens à demander des comptes aux Etats-Unis et à leurs alliés sur le réseau Echelon.

PHILIPPE COUVE
04/07/2000

 


La base de Menwith Hill, en Angleterre, centre nerveux du réseau Echelon en Europe
© RFI

 


Notre dossier de février 1999

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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